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Pour le moment, les outils scientifiques ne permettent pas de savoir, avec précision, ce qu’est l’autisme.
Comment définir l’autisme ?
Cette question est un paradoxe. Une définition permet de comprendre quelque chose. Et la société essaye de comprendre l’autisme. Cependant, avant d’expliquer un phénomène, il faut d’abord pouvoir le décrire. La description présente de manière détaillée ce qui est étudié. Or, la description de l’autisme change depuis un siècle et continue de progresser avec l’évolution de la technologie. Donc, sans description correcte (c.-à-d. : intemporelle et impartiale), comme l’explique le site Autistes.fr : la définition de l’autisme est un leurre. La première question doit être :
« Comment décrire l’autisme ? »
Est-ce qu’un texte de loi peut décrire l’autisme ?
Non. Car, la loi n’a pas pour objectif ou comme principe de faire une description. Le texte de loi est soit un projet de loi, soit une proposition de loi. Dans les deux cas, l’autisme ne peut pas y être décrit. La loi fait seulement appliquer des règles. Prenons par exemple la loi Chossy de 1996. Il est dit :
« Toute personne atteinte du handicap résultant du syndrome autistique et des troubles qui lui sont apparentés bénéficie, quel que soit son âge, d’une prise en charge pluridisciplinaire qui tient compte de ses besoins et difficultés spécifiques. Adaptée à l’état et à l’âge de la personne, cette prise en charge peut être d’ordre éducatif, pédagogique, thérapeutique et social. Il en est de même des personnes atteintes de polyhandicap. »
La loi Chossy ne décrit même pas l’autisme comme un handicap. Cette loi concerne la prise en charge des personnes qui présentent un handicap (ou une déshabilité) lié au "syndrome autistique". Cette appellation recouvre "les troubles du spectre de l’autisme (TSA)" et tout ce qui y ressemble. Ainsi, un médecin commence par diagnostiquer un TSA ou quelque chose qui y ressemble. Ensuite, la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH) analyse le dossier médical et constate s’il y a une déshabilité. Et enfin, la loi Chossy évoque la prise en charge de la déshabilité. Aucun texte de loi ne décrit l’autisme.
Est-ce que le DSM-5 et la CIM-11 peuvent décrire l’autisme ?
Avant de répondre à cette question, il faut d’abord expliquer le problème de vocabulaire de ces manuels. Le vocabulaire médical est assez complet comme en témoigne la nuance des mots : trouble, désordre, désaises, maladie, nausée, affection, mal, impairement, déshabilité, handicap, morbidité, etc. en français ; et trouble, disorder, diseases, illness, sikness, malady, ailment, impairement, disability, handicap, morbidity, etc. en anglais. Cependant, le langage médical voyage beaucoup avec le temps. Et certains mots voient leur sens évoluer ou mal traduit. Prenons le DSM, qui est l’abréviation anglaise de "Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders", traduit en français par "Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux". Le mot anglais "disorder" est mal traduit en français. Le DSM affiche "des troubles mentaux", mais en réalité, il évoque bien plus de sujets médicaux. Dans le DSM-5, l’Association américaine de psychiatrie (AAP) aborde aussi des troubles neurodéveloppementaux, des maladies, des catégories "trouble non spécifié" ou "troubles induits par un médicament" et toute condition dont le "fonctionnement mental" implique une prise en charge à l’hôpital. Il n’y a pas que des troubles mentaux dans le DSM-5. De même, on remarque un problème avec la CIM, qui est l’abréviation de "Classification internationale des maladies", traduction de l’anglais "International Classification of Diseases (ICD)". Le mot anglais "diseases" est mal traduit en français, car il ne veut pas dire "maladies" mais "désaises". Dans la CIM-11, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) mentionne aussi des troubles neurodéveloppementaux, des troubles comportementaux, des tumeurs, des troubles du sommeil, il y a une catégorie "grossesse, accouchement ou puerpéralité" ou encore "affections liées à la santé sexuelle". Il n’y a pas que des maladies dans la CIM-11. Enfin, en France, au quotidien, on retrouve d’autres problèmes de vocabulaire. Pour certains, les mots "trouble" et "maladie" sont synonymes, alors que ce sont deux concepts très différents. Une maladie est une altération de l’état de santé, qui implique des souffrances et l’hypothèse d’une guérison. Tandis que, dans le domaine considéré ici, le trouble identifie une :
« Perturbation cliniquement significative de la cognition d’un individu, de sa régulation émotionnelle ou de son comportement, et qui reflète l’existence d’un dysfonctionnement dans les processus psychologiques, biologiques ou développementaux [...] ». (DSM-5)
Il existe également d’autres critiques. Entre autres, est-ce qu’un "dysfonctionnement" doit être reconnu par la société, ou de manière objective ? Maintenant, si vous voulez découvrir pourquoi tous ces problèmes de vocabulaire ne sont toujours pas corrigés, je vous propose de faire les démarches vous-même pour changer cela. Mais, si cela ne vous intéresse pas de participer à la refonte d’une partie du vocabulaire médical français employé depuis 60 ans, il faut attendre que d’autres le fassent ou que la médecine française décide de se corriger...
Ainsi, par flemme, par incompétence, par malhonnêteté ou autres ; quelles que soient les raisons qui poussent la médecine française à ne pas se corriger, elle entretient un vocabulaire dégradant. Et ce problème favorise des préjugés pathologiques sur l’autisme.
Donc... Est-ce que le DSM-5 et la CIM-11 peuvent décrire l’autisme ?
Non. L'AAP et l'OMS détaillent entre-autres les perturbations cliniquement significatives dans le contexte de l’autisme. Plus précisément, le DSM-5 et la CIM-11 décrivent (plus ou moins bien) les troubles du spectre de l’autisme, qui se manifestent chez certains autistes.
Dans le DSM-5, l'AAP présente les TSA avec des « déficits persistants de la communication et des interactions sociales_» et avec un « caractère restreint et répétitif des comportements, des intérêts ou des activités ». Ces critères apparaissent « soit au cours de la période actuelle, soit dans les antécédents ». En conséquence, l’AAP admet aussi l’existence d’autistes qui n’expriment pas un TSA, soit dans le présent, soit dans le passé. Ensuite, concernant la sévérité des symptômes, le DSM-5 ajoute :
« Les spécifications de sévérité (cf. tableau 2) peuvent être utilisées pour décrire succinctement les symptômes actuels (qui peuvent se situer en deçà du niveau 1), en tenant compte du fait que les symptômes peuvent varier en fonction du contexte et fluctuer dans le temps. »
Le niveau 3 de sévérité est intitulé « Nécessitant une aide très importante », le niveau 2 « Nécessitant une aide importante », et le niveau 1 « Nécessitant de l’aide ». Par déduction, le niveau en dessous du niveau 1 est le niveau 0 « Ne nécessite pas d’aide ». De plus, l’AAP se permet de rappeler que le diagnostic de TSA n’implique pas obligatoirement une reconnaissance de déshabilité :
« Les catégories décrivant la sévérité ne doivent pas être utilisées pour décider de l’attribution de droits ou de services ; ceux-ci sont à déterminer à un niveau individuel, après avoir analysé les priorités et les objectifs personnels. »
Enfin, le DSM-5 évoque l’existence d’autistes autonome :
« [...] ces personnes ont tendance à avoir des compétences intellectuelles et langagières supérieures et sont capables de trouver des secteurs compatibles avec leurs intérêts et leurs compétences. En général, les individus ayant un retentissement fonctionnel léger sont plus à même de devenir autonomes. Cependant, même ces derniers peuvent rester socialement naïfs et vulnérables, avoir des difficultés à s’organiser sans aide pour les démarches de la vie courante, et sont à risque pour le développement de symptômes anxieux et dépressifs. La plupart des adultes disent utiliser des stratégies de compensation et pour faire face, pour masquer leurs difficultés en public, mais souffrent du stress et des efforts nécessaires pour maintenir un fonctionnement social acceptable. »
Néanmoins, sans l'expression de perturbation cliniquement significative, le DSM-5 ne peut pas diagnostiquer ces autistes autonomes.
Quant à la CIM-11, l'OMS décrit les troubles du spectre de l’autisme avec des « déficits persistants dans l’initiation et le maintien de la communication sociale et des interactions sociales réciproques » et des « caractères persistants, restreints, répétitifs et inflexibles de comportement, d’intérêts ou d’activités qui sont clairement atypiques ou excessifs pour l’âge de l’individu et le contexte socioculturel ». La CIM11 nuance aussi la période du diagnostic :
« Ce trouble débute pendant la période du développement, en général à la petite enfance, mais les symptômes peuvent ne se manifester que plus tardivement, lorsque les exigences sociales dépassent les capacités. »
La CIM-11 mentionne donc l’apparition d’un TSA soit durant l’enfance, soit plus tard. Un (adulte) autiste manifeste un TSA lorsque les exigences sociales (justifiées ou non) dépassent ses capacités. Toutefois, sans ce dépassement, l’autiste ne présente pas de TSA. Et sans trouble, un autiste reste un autiste, mais ne reçoit pas de diagnostic. Le DSM-5 et la CIM-11 décrivent seulement (plus ou moins bien) les TSA, et pas l'autisme de manière générale.
Depuis longtemps, la recherche clinique croit que sa capacité à reconnaître l’expression pathologique de l’autisme suffit à décrire l’autisme dans sa totalité. Pour se persuader d’avoir raison, plusieurs médecins, comme Leo Kanner, ont sciemment pathologisé certaines expressions de l’autisme. Ce faisant, ils peuvent nier toute approche de l’autisme en dehors de la recherche médicale.
Pour d’autres, qui sont subventionnés pour guérir des maladies confondues avec l’autisme dans les années 70. Il n’y a aucun intérêt à dissocier l’autisme de leur recherche, tant le mot autisme apporte des financements plus facilement. Il y a aussi
certains pédiatres qui réalisent de faux diagnostics de TSA. Car parfois, le diagnostic de TSA permet d'avoir de meilleurs services d'aide. Ainsi, certains enfants dans le besoin, qui ne sont pas autistes, peuvent bénéficier d'une meilleure aide avec un faux diagnostic de TSA. Puis, on retrouve également des diagnosticiens qui par excès de zèle attribuent des TSA à des autistes qui n'ont jamais eux de perturbation cliniquement significative dans le contexte de l'autisme. Parce qu’ils savent que le diagnostic du TSA est un passe-droit qui permet dans certains cas aux autistes de s'assumer et de s’épanouir. Trop souvent, les autistes qui n’ont pas de diagnostic se voient stigmatisé par la société et
les autistes honteux. Les "autistes honteux" ont un TSA et des comorbidités. Ils ont quantité de préjugés pathologiques sur l’autisme. Et ils confondent leur expression de l’autisme avec leurs autres troubles. Alors, ils considèrent que l’autisme est la source de tout leur problème. D’ailleurs, ils ne veulent pas comprendre la différence entre l’autisme et les TSA. Car, ils ne pourraient plus se plaindre d’être autistes dans les médias et les réseaux sociaux. Plus sérieusement, ils seraient obligés de se reconnaître un autre trouble (du sommeil, de l’anxiété, etc.) en plus de leur TSA. Une situation qui serait trop dégradante pour eux, d'après leurs préjugés pathologiques. Pourtant, la distinction de l’autisme et du TSA leur permettrait d’avoir des aides plus efficaces, ciblant leurs véritables difficultés individuelles, plutôt que de stigmatiser l’autisme et les autistes.
Est-ce que les troubles du spectre de l'autisme peuvent décrire l'autisme ?
Non. Les troubles du spectre de l’autisme décrivent l’expression de l’autisme dans un contexte pathologique. Toutefois, l’autisme ne s’exprime pas exclusivement dans un contexte pathologique. Même le DSM-5 et la CIM-11 l'indiquent. Donc, on ne diagnostique pas l'autisme, mais des troubles du spectre de l'autisme. Dans son ensemble, l’autisme n’est pas identifiable à "des perturbations cliniquement significatives"
comme le soulignent différents mouvements d’autistes
à travers le monde. Ou l’existence des autistes qui reçoivent un diagnostic tardif (tel que
Anthony Hopkins), pour un TSA présent ou passé. Des autistes, qui n’ont jamais reçu de diagnostic de TSA (tel que
Hugo Horiot). Et des autistes, dont la réussite sociale, ou l’autonomie (tel que
Elon Musk), ne caractérisent aucun "dysfonctionnement". Ainsi que, le psychiatre Eugen Bleuler (1857-1939), qui est à l’origine du mot "autisme". Il parle entre autres d’une "pensée autistique" participante à l’imagination et qui serait commune dans les métiers intellectuels. La psychiatre Grounia Soukhareva (1891-1981), qui étudiait l’autisme dès 1925. Elle remarque chez des adolescents autistes qu’ils ne sont pas à guérir, mais seulement à stimuler différemment. Le psychiatre Hans Asperger (1906-1980), qui étudie et défend l’autisme pendant la Seconde Guerre mondiale. Autiste lui-même (Lyons et Fitzgerald (2007)), il est le premier à parler d’un spectre de l’autisme, allant d’un "don spécial" avec des "incommodités sociales", jusqu’à un "autisme par automatisme" caractérisé par une
déshabilité intellectuelle. La psychiatre Lorna Wing (1928-2014), qui en 1980 réfute les préjugés pathologiques sur l’autisme créés par la psychanalyse et Leo Kanner. La sociologue Judy Singer qui, dans
sa thèse, fait de l’autisme une diversité neurologique plutôt qu’un "dysfonctionnement". La chercheuse Michelle Dawson qui combat la pathologisation de l’autisme grâce à la science. Le professeur titulaire de psychiatrie et chercheur Laurent Mottron, qui écrit le livre "L’autisme : une autre intelligence : Diagnostic, cognition et support des personnes autistes sans déficience intellectuelle".... la liste des chercheurs ou professionnels qui expliquent l’autisme autrement qu'avec un trouble continue encore longtemps. La conclusion est que l’autisme n’est scientifiquement pas identifiable à un "TSA". L’autisme est une diversité humaine, comme l’est la rousseur ou la couleur de la peau. Ainsi, parmi les humains, il y a des autistes et des non-autistes. Et parmi les autistes, il y en a qui présentent des TSA et d’autres non.
Vidéo explicative sur la diversité des autistes.
(“Pédagogie” sur : « Représentativité pour »)
Malheureusement, cette notion de l’autisme (différent des TSA) n’est pas connue de tous. Dans le milieu anglophone, notamment. Des autistes, scientifiques ou militants de la neurodiversité confondent encore l’autisme avec les troubles du spectre de l’autisme. Cette confusion entre l’autisme et les TSA crée une situation invraisemblable qui bloque toutes avancées sociales pour les autistes. En effet, pour mieux respecter l’autisme comme une diversité humaine, certains autistes cherchent à sortir les TSA (qu'ils amalgament avec l’autisme) du DSM-5 et de la CIM-11. Mais cela cause des paradoxes. La commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) ne peut reconnaître une déshabilité, que si les difficultés éprouvées concernent un trouble. Donc, si les TSA (confondu avec l’autisme) sortent du milieu médical, les autistes qui présentent des TSA ne seront plus susceptibles de recevoir des aides, et c’est problématique. Le site Autistes.fr note une autre incohérence :
« Et donc, sortir le TSA du DSM, c’est que l’autisme est parfait, il ne peut pas avoir de troubles, donc l’autisme c’est la perfection. Ou alors, c’est que l’autisme ne peut subir que des troubles qui ne sont pas des troubles de l’autisme […]
Donc, sortir le TSA du DSM, ça a pour but que les autistes n’aient que des troubles « non autistiques » : que des troubles identiques à ceux des non-autistes. Ben dans ce cas, les autistes sont des non-autistes. […]
On leur (nous) donnera des allocs pour du non autisme troublé [Visage avec des larmes de joie]. » @frdm
Seulement, parfois, les autistes peuvent aussi exprimer leur autisme dans un contexte pathologique. Sortir les TSA du milieu médical empêcherait les autistes qui manifestent un TSA de faire reconnaître d’éventuelles déshabilités pour avoir des aides.
En conclusion, la recherche clinique découvre l’autisme en abordant ses expressions pathologiques. Mais le DSM-5 et la CIM-11 évoquent aujourd’hui l’existence d’autistes sans perturbation cliniquement significative. Ces autistes sans TSA ne sont pas diagnostiqués puisqu’ils n’ont pas de trouble. Ils sont donc invisibles aux yeux de la recherche médicale. Le DSM-5 et la CIM-11 ne décrivent qu’une partie des autistes. Les "troubles du spectre de l’autisme", anciennement appelés "trouble envahissant du développement, syndrome d’Asperger, autisme de Kanner, syndrome du savant, syndrome autistique, symptômes de l’autisme, troubles infantiles autistiques, psychose infantile, psychopathie autistique, autisme infantile, trouble de la personnalité schizoïde" ... Toutes ces dénominations (certaines du lexique médical et d’autres du lexique fantaisiste français) ne décrivent pas l’autisme, mais éventuellement, pour certaines, quelques expressions de l’autisme. Le TSA est une manifestation de l'autisme dans un contexte pathologique, et d'autistes qui sont pathologisés (sans que la cause puisse être précisée dans le DSM-5 ou la CIM-11). Les autistes qui présentent un TSA ne permettent pas de décrire l’autisme à eux seuls. Car il existe aussi des autistes sans diagnostic ou sans troubles tels que cela est établi par déduction (DSM-5, CIM-11). Seule la recherche scientifique, qui n’est pas orientée pour voir obligatoirement des troubles chez les autistes, peut essayer de décrire l’autisme.
Est-ce que la recherche scientifique peut décrire l’autisme ?
Oui. La recherche scientifique peut décrire l’autisme. La méthodologie scientifique possède les moyens d’étudier l’autisme convenablement. Les scientifiques qui s’orientent dans la recherche sur l’autisme peuvent aboutir à une description de l’autisme démontrée objective et intemporelle. Contrairement à la recherche clinique, qui est capable de voir seulement des autistes en situation de déshabilité. La médecine est une discipline qui a pour but de soulager, tandis que la science a pour but de décrire les choses et de les faire comprendre. La recherche scientifique se donne les moyens d’étudier tous les autistes. L’autisme est alors examiné sous tous les angles, et pas uniquement avec celui de la médecine.
Est-ce que la recherche scientifique a déjà décrit précisément l’autisme ?
Non. Malencontreusement, les moyens d’investigation d’aujourd’hui ne sont pas suffisants pour élaborer une description complète de l’autisme. Pourtant, une telle description permettrait ensuite d’essayer d’expliquer l’autisme. Et la compréhension de l’autisme est très importante, pour combattre la maltraitance institutionnelle, les aides inadaptées, les effets golem, les préjugés pathologiques, les arnaques, la stigmatisation... C'est pourquoi la recherche continue, mais les scientifiques n’ont qu’une notion incomplète de l’autisme pour le moment. Pour restreindre les erreurs de description approximative de l’autisme, les chercheurs emploient la réfutation. « La réfutation est un procédé logique consistant à prouver la fausseté ou l’insuffisance d’une proposition ou d’un argument » (Wikipédia). Plus les erreurs de perception de l’autisme sont éliminées, et plus la recherche est susceptible de mieux décrire l’autisme. Autrement dit, plus les questions autour de l’autisme sont résolues, et mieux la recherche ajuste sa description de l’autisme.
Entre autres : conformément à la méthodologie scientifique, plusieurs études (ici, là, ou ici, encore là, etc.) établissent l’absence de lien prétendu entre l’autisme et les vaccins. D’autres études révèlent que l’expression la plus commune de l’autisme n’est pas associée à une déshabilité intellectuelle. Un autre article montre que l’autisme concerne un peu plus de 4% du génome humain. Dans la société, les autistes peuvent (souvent ?) simuler un fonctionnement de « non-autistes ». L’autisme existe depuis la préhistoire. Donc, il apparaît invraisemblable de croire que l’autisme est rare, ou que l'autisme existe à cause de maux environnementaux modernes. De même, pour répondre à cette critique de l’incomplétude, des hypothèses apparaissent. L’hypothèse de la double empathie nous explique « qu’une rupture de la réciprocité et de la compréhension mutuelle peut se produire entre autistes et non-autistes ». Il y a aussi l’hypothèse du monde intense, qui conclut :
« Contrairement à d’autres hypothèses sur l’autisme axées sur les déficits, l’hypothèse du monde intense indique qu’un fonctionnement cérébral accru pourrait être au cœur de l’autisme […] et ce sont en fait ces capacités qui peuvent rendre le monde trop intense, voire aversif, et entraîner de nombreux symptômes autistiques, notamment le repli sur soi et l’évitement social. »
Le monotropisme, quant à lui, considère l’autisme comme :
« La tendance de nos intérêts à nous attirer plus fortement que la plupart des gens. L’hypothèse repose sur un modèle de l’esprit en tant que "système d’intérêts" : nous sommes tous intéressés par de nombreuses choses, et nos intérêts nous aident à diriger notre attention. Différents intérêts sont saillants à différents moments. Dans un esprit monotrope, moins d’intérêts ont tendance à être éveillés à tout moment, et ils attirent une plus grande partie de nos ressources de traitement, ce qui rend plus difficile le traitement des choses en dehors de notre tunnel d’attention actuel. »
Face à cette notion incomplète de l’autisme dans la recherche, les scientifiques se posent des questions. Certains auteurs autistes vont aussi se permettre des suppositions. Dans "L'autisme expliqué par un autiste", Thibaud Moulas relie l’autisme à « un niveau d’intensité élevé (soit très haut, soit très bas ; les nuances demandent plus d’effort) dans les actions réalisées, les émotions, les sens ou les intérêts » et « un comportement plus rationnel (plus facilement objectif, moins impacté par la communauté) et moins instinctif (les émotions et les codes sociaux fondés sur l’implicite peuvent être mal intégrés) ». Mais passons les hypothèses pour revenir au concret. La morphologie du cerveau des autistes n’est pas différente de celle des non-autistes. Par contre, il y a moins d’élagage synaptique chez les autistes. Le cerveau des jeunes autistes semble se développer différemment, avec une région associée au langage plus grande. Des organoïdes cérébraux d’enfants autistes ont tendance à être plus gros que ceux des non-autistes. Plein d’études s’orientent sur le fonctionnement du système nerveux (la substance blanche, la matière grise, les synapses, le système nerveux central et périphérique, etc.). Mais les technologies pour étudier le cerveau ne sont pas encore assez développer pour aboutir à une description pertinente de l’autisme. Qui plus est, il y a un problème persistant : l’emploi du vocabulaire pathologique (transmis par le milieu médical) dans la recherche scientifique sur l’autisme. Plusieurs chercheurs, comme Laurent Mottron, mentionnent l’intérêt de faire évoluer le vocabulaire scientifique sur l’autisme. Car, certains scientifiques utilisent un mauvais vocabulaire pour parler de l’autisme. Est-ce à cause de conflits d’intérêt, d’incompétence, ou pour se conformer à une mafia littéraire ? Ce n’est pas clair. Pour remédier à ces problèmes, des scientifiques autistes proposent une solution :
«
Il faut davantage de chercheurs autistes dans le monde pour attirer l’attention du monde sur leurs points de vue sur l’autisme. […]
Pour accroître la fiabilité de la recherche sur l’autisme en général, il est nécessaire de créer des réglementations claires sur l’engagement éthique avec la communauté autistique au sens large, en utilisant les directives existantes comme base et en visant un consensus mondial. Il est essentiel d’accroître la transparence de la recherche sur l’autisme, de s’attaquer aux conflits d’intérêts et de renforcer l’influence des autistes pour développer la responsabilité et la confiance.
»
Est-ce que les autistes peuvent décrire l’autisme ?
Non. Ni un club d’autistes, ni un mouvement politique d’autistes ou une association d’autistes ne peuvent décrire l’autisme. En science, la "quantité" ne l’emporte jamais sur la "qualité". Pour décrire l’autisme, une petite centaine de scientifiques (compétents), spécialisés dans la recherche sur l’autisme, sont toujours plus pertinents qu’un milliard d’autistes. "Un milliard" ? Oui, car la proportion d’autistes dans le monde évaluée à 1 % est un préjugé. Ce préjugé se fonde sur la confusion de l’autisme avec des maladies rares. La réalité est tout autre, 5%, 10%, 15% … personne ne le sait vraiment. En effet, pour savoir précisément combien il y a d’autistes dans le monde, faut-il encore compléter la description de l’autisme. Sans description correcte de l’autisme, il est impossible de définir l’autisme. Et sans définition, il est impossible de reconnaître tous les autistes. Tout ce que l’on sait aujourd’hui, avec l’évolution de la recherche, c’est que l’autisme n’est pas aussi rare que 1% de la population. Quoi qu’il en soit, même si cent millions d’autistes participent à un sondage d’opinion (après la vérification de la participation de cent millions d’autistes). Le sondage d’opinion n’équivaut jamais à la démonstration scientifique, impartiale et vérifiable. Les enquêtes d’opinion, tout comme les associations, sont intéressantes et utiles pour faire entendre la voix des autistes, dans le social ou en politique. Mais le sondage d’opinion possède aussi des défauts (explication Wikipédia). Tout le monde possède un avis sur quelque chose. Le fait que plusieurs personnes partagent un même avis, ou qu'une majorité de personne partagent un avis, ne le rend pas plus vrai. Et toutes les opinions ne se valent pas. Le plus important, ce sont les démonstrations qui composent le point de vue. Et non pas la façon dont l’avis est présenté. Pour pouvoir présenter une description de l’autisme de manière objective, sans témoignage fallacieux de la preuve anecdotique, sans conflit d’intérêts, et en acceptant la critique (et d’évoluer), il faut utiliser la méthodologie scientifique.
Est-ce que des autistes peuvent décrire l’autisme ?
Si ce sont des scientifiques effectuant leur recherche sur l’autisme : oui. Mais, sans cela : non.
Est-ce que des autistes scientifiques ont déjà décrit précisément l’autisme ?
Non. Pour les mêmes raisons citées précédemment, concernant la notion de recherche scientifique.
En résumé, que peut-on dire de l’autisme ?
Cela dépend des compétences de l’individu avec qui vous partagez l’information.
La diversité des autistes est très grande. Les généralisations sur l’autisme fondées sur la santé sont mauvaises. L'autisme n'est pas une maladie, ni un trouble, ni un handicap (ou déshabilité). L’autisme n’a aucun lien avec les vaccins, les OGM, l'exposition prénatale à l'alcool, la 5G, les fantaisies psychanalytiques ou déshabilité intellectuelle (handicap mental). L’autisme est une diversité humaine comme l’est la rousseur. L’autisme n’est pas aussi rare qu’on le croit (peut-être 10% de l’humanité ?) et existe depuis la préhistoire. Votre joueur de foot préféré est peut-être un autiste sans le savoir. D’un point de vue biologique, l’autisme concerne un bon millier de gènes. L’autisme se différencie du non-autisme à travers l’analyse microscopique du système nerveux et de ce qui l’entoure. Les autistes fonctionneraient "plus facilement (?)" de façon "plus intense (?)". Les connaissances et les moyens (y compris en imagerie) ne sont pas suffisamment avancés pour décrire plus précisément l’autisme. En attendant, l’autisme s’explique, tant bien que mal, comme une manière parfois "plus soutenue (?)" de recevoir, concevoir ou transmettre une information ou une sensation. Il y a beaucoup d’hypothèses et de questionnement, mais on ne peut pas faire autrement pour le moment. La recherche avance. L'autisme n'est pas un trait de caractère ou un niveau d'intelligence. L’autisme ne doit pas être vu comme la force ou la faiblesse des autistes, mais plutôt comme "le truc neuronal (?)" qui influence, parfois, de différentes manières, les forces et faiblesses des autistes. Car l’autisme s’exprime différemment d’après les autistes (leur personnalité, leur santé, leur expérience) et leur environnement (l’influence positive ou négative). Certains autistes manifestent des troubles du spectre de l’autisme. Ce sont des troubles spécifiques aux autistes. Les TSA peuvent évoluer dans le temps. La médecine à partir de l’état actuel de la connaissance scientifique essaye de décrire les TSA au mieux avec le DSM-5 et la CIM-11. Mais des progrès restent à faire. Socialement, les autistes (avec et sans TSA) n’ont pas les moyens de s’épanouir, à cause de nombreux préjugés pathologiques à leur égard. Les préjugés pathologiques créent des maltraitances institutionnelles, effet golem, aide inadaptée, stigmatisation, etc. Et les médias n’arrangent rien, car ils dépeignent l’autisme via des caricatures. Pour essayer de changer cela, les autistes s’organisent, en association comme en science, pour se défendre. Mais la société a du mal à évoluer. Parce qu'il y a plusieurs problèmes : des conflits d’intérêt, de l'incompétence, de la malhonnêteté, des arguments fallacieux, un mauvais vocabulaire, etc.
Votre interlocuteur est coincé sur des préjugés pathologiques sur l’autisme ? Dans ce cas : Bonne chance.
Que faire en attendant ?
Si vous voulez agir, rejoignez (?) la recherche sur l’autisme. Faites évoluer l’éthique, le vocabulaire et la technologie scientifique ? Sinon, informez-vous sur la manière de créer une association pratiquant la représentativité pour les autistes. Car, seule une association pratiquant la représentativité pour les autistes possède les moyens de faire valoir l’autisme dans la société.
Merci pour votre participation. Votre contribution n'apparaîtra qu’après avoir été validée par la modération.
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